« - Cache tes pouvoirs. N'en parle pas. Fais attention ; le secret survivra. » · Combien de fois ais-je bien pu entendre ces paroles ? Gravés autrefois dans ma mémoire, il me sembla les avoir entendu durant toute mon enfance, que cela soit de la part de ma mère ou bien de mon père. Roi et Reine d'Arendelle... Car ils avaient peur. Peur qu'une telle rumeur ne soit répandue. Après tout, vous savez bien de quoi sont capables les enfants, n'est ce pas ? Ils disent toujours la vérité... Peut être alors aurais-je bien pu démontrer ce que j'étais capable de faire aux autres enfants du village. Ou bien utiliser mon don dans le simple but de m'amuser lors de l'une de mes sorties à l'extérieur de la citadelle... Mais de tels affirmations pouvaient contraindre les grands souverains à fuir le pays, traqués et chassés par son propre peuple en plus de voir leur pauvre garçon se retrouver sur un bûcher, exécuté pour sorcellerie.

Si jeune... Si innocent. J'avais certes, des pouvoirs qui pouvaient causer de grands problèmes. Glacer ma propre chambre et la Grande Salle prônant le château n'était seulement qu'une infime partie de ma magie et cela n'était rien comparé à ce que j'étais capable de provoquer... Oui, je pouvais répandre la terreur et retirer des vies. Mais fallait-il pour autant chercher à sacrifier mon existence pour sauver les âmes des habitants de d'Arendelle ? Non, mes parents ne se le permettraient pas. Ils voyaient encore cela comme un don de la nature qu'il ne fallait pas gâcher et non comme une arme de destruction ou une malédiction. Au contraire, c'était pour eux une bénédiction faisant de moi seulement une personne différente avec des capacités qu'il fallait savoir malheureusement gérer dans une société comme celle-ci, où les personnes uniques dans leur genre sont mal vu... Dans mon cas, je pouvais être dévisagé comme un sorcier ; un apôtre du Malin.

Alors la plupart du temps, ce fut à l'intérieur de notre château même que venait quelques personnes pour pouvoir faire mon éducation, si ce n'est mes parents qui s'en chargeaient la plupart du temps, radotant se qu'ils savaient déjà. Du haut de la fenêtre de ma chambre fut le seul véritable accès pour contempler l'extérieur et voir les habitants travailler, s'occuper et les enfants de mon âge, jouer ensemble... Un quotidien assez ennuyeux si on y repense bien aujourd'hui. Je n'avais pu profiter pleinement de mon enfance, j'avais grandis trop vite... Jusqu'à l'arrivé d'un autre bambin. J'allais avoir un frère, j'étais comblé ; je n'allais plus me languir dans ce donjon entouré de parents bien trop protecteurs, ne désirant que m'aider à accéder au pouvoir lorsque mon père serait trop vieux. Mais aussi et surtout, à m'assurer que je ne ferais de mal, ni à mon peuple ni à mon frère...

Horrible à croire quand on le voyait dans son berceau, les joues roses, les yeux d'un bleu exquis et sa petite bouille de créature à en faire fondre plus d'un ! Il n'avait rien à voir avec moi, qui semblait, de par mon apparence maladif, vide de vie. Nous étions le jour et la nuit. J'avais l'impression même qu'il ne pouvait être que le seul à régner sur le royaume d'Arendelle, que lui au moins, peut être ne causerait-il point vent et tempête sur son passage. Qu'il n'aurait pas à contrôler ses pouvoirs face à son auditoire, lorsqu'il devra se présenter en dehors de notre château... Comme si au final, mes parents eurent assez de pitié pour désirer me voir reprendre le pouvoir. Je n'étais vraiment pas fait pour cela. Et nos parents avaient beau essayer de me convaincre, plus le temps passait et plus j'avais l'impression d'être un monstre, que je n'avais point ma place au château, que je ne pouvais être juste l'ombre de mon magnifique frère... Surtout lors de ce jour horrible... Un accident qui n'aurait jamais dû avoir lieu...

« - Je voudrais un bonhomme de neige...! »

Il était tard, et comme à notre habitude, nous nous dirigions vers la salle du trône où je laissais librement ma magie m'envahir pour divertir mon jeune frère, le seul petit garçon qui pouvait s'amuser avec moi, et le seul dont j'étais assuré qu'il ne fuirait pas en me voyant user de ma magie. Mon seul et unique ami... J'étais si heureux, et nous étions si complices... Malheureusement, tout dérapa en une nuit alors que j'eus laissé ma magie m'envahir maladroitement pour aller ricocher sur la tête de mon frère qui s'écroula au sol, inerte.

Effrayé, j'eus appelé mon père qui emmena mon frère voir le roi des trolls, le seul qui saurait le libérer de cette magie qui l'avait blessé. Lui enlevant par la même occasion, quelques souvenirs concernant cette soirée sombre ainsi que tout cette réminiscence touchant l'existence de mes pouvoirs afin de s'assurer donc qu'un autre évènement de ce genre ne puisse se reproduire à nouveau... On me conseilla alors de faire attention ; Peur. Stresse. Émotion... Je ne devais jamais laisser mes sentiments m'envahir, risquant de ne plus être capable d'user mes dons selon mes envies... Néanmoins, depuis ce  bouleversement, je fis un tout autre choix : La décision de rester dans ma chambre et de ne jamais sortir afin de ne point blesser une nouvelle fois mon frère... Malgré ses demandes, ses pleures et ses prières... Même si l'envie voulu me pousser à ouvrir la porte pour le retrouver, je ne le fis pas. J'étais devenu un danger, et mes parents ainsi que moi-même pensions que le meilleur moyen de le protéger était de m'en éloigner un maximum. Peut être s'ennuyait-il sans moi, mais au moins, il était en sécurité à présent...

Le jour J arriva finalement ; le couronnement. J'allais devenir le souverain des Terres d'Arendelle, mais aussi et surtout, j'allais revoir mon frère de nouveau, et je ne savais ce qui allait se passer face à cette foule qui allait assister à l'évènement. J'étais totalement paniqué, songeant que je n'arriverais à tenir ne serait-ce qu'une minute à l'extérieur de mon donjon. Que lorsque je serais sortis, peut être allais-je provoquer la neige et la glace. Que tout ces gens qui avant, attendaient ma succession au trône, allaient finalement bondir sur moi, fourche et torche en main. Fort heureusement, cela semblait se dérouler tranquillement jusqu'au bal. En réalité, je n'avais vu que mon frère au début de la cérémonie avant qu'il ne s'éclipse pendant longtemps pour ensuite revenir lors du Bal... J'eus parcouru la scène et dansa que quelques instants dans les bras d'une jeune femme avant de m'en éloigner lorsque je cru que ma magie m'envahissait, comme prête à surgir.. Puis ensuite, alors que la musique semblait se calmer, j'eus remarqué mon frangin, au milieu de la piste, dansant au côté, lui aussi d'une autre femme. Une sublime créature dont j'aurais pu aisément jalousé, mais au lieu de aller le séparer d'elle, je ne fis que de l'épier, assis sur mon trône. Seulement, je ne m'attendais pas à la déclaration qui allait me faire...

Il désirait se marier avec elle. Je me souviens encore de ce regard presque haineux que je lançais envers cette créature à l'apparence naïve et simple. De ces émotions qui m'inondaient, prêt à exploser à tout bout de champs. Les poings serrés, je m'étais rapproché de cet homme qui me donnait encore l'impression d'un gamin encore un peu sot, ne sachant réellement ce qu'est la vie et que cela ne signifiait pas s'unir avec la première personne venue. Oui j'avais d'abord...

Peur. Je m'étais juré de le protéger encore et toujours, ce n'était donc pas maintenant que j'allais ainsi l'abandonner dans les bras d'une parfaite inconnue. Une sirène. Une tentatrice. Une sorcière. Je ne le voyais pas ainsi fuir avec elle. Je ne voulais tout simplement pas qu'elle arrache la seule personne au monde qui m'était le plus cher, comme s'il aurait pu être mon prince à moi dont je ne voulais partager avec personne d'autre. Et puis, le simple fait qu'il veuille épouser n'importe qui, de cette manière, sur un coup de tête ne fit qu'augmenter cet alarme qui sonnait. Qui m'indiquait que peut être était-elle remplit de mauvaises intentions et qu'il était en train de faire le mauvais choix... J'eus alors lancé un "Non" glacial à la figure de mon ami, qui m'eut regardé presque étonné de refuser une telle demande alors que je l'avais lâchement abandonné après toutes années passés ensemble. Comme si au fond, il me disait que je ne pouvais faire autrement qu'accepter après avoir très mal joué mon rôle de grand frère protecteur...

Stresse. Je sentis mes mains se geler, la température chuter d'un coup et je ne savais pas comment me calmer alors que je sentis cette énergie familière m'envahir peu à peu... Comment lui dire que j'avais fais cela dans l'unique but de le protéger ? Le protéger de moi. Et comment l'exprimer sans parler de mes dons destructeurs face à une foule de gens ici là ? La foule... Ils sont tous là, en train de nous regarder avec incompréhension. A se demander ce qui a bien pu provoquer ma colère en cette journée glorieuse pour moi. Mais mon frère insiste et c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. C'est d'abord la piste qui se gèle sous mes pas. Et alors quelques cris surgissent parmi le peuple dont également mon plus proche frère. J'ai la soudaine impression d'être un monstre de foire exposé à la lumière...

Émotion. La neige envahit totalement la salle alors qu'elle devient totalement incontrôlable. Je vois finalement des gens fuir tandis que d'autres tentent de m'arrêter. Je suis totalement désespéré. Il est à présent trop tard pour faire marche arrière et c'est impossible de les raisonner. Aussi, j'entends le surnom de sorcier résonner parmi ces bruits de hurlements... Il n'est plus question pour moi de rester là, je décide alors de prendre la fuite, sans jamais m'arrêter, ne doutant pas un seul instant avoir provoqué un hiver éternel. Cela m'importe presque pas... Alors que je fuis à travers les montagnes, je retrouve même une sorte d'apaisement dans ma solitude. Au diable ma famille et le royaume entier ; j'étais enfin libre de faire ce que je veux, créant alors une citadelle à mon image ; faite totalement de glace et surplombant de toute ma puissance à travers les collines et les pics. Je dominais à présent le pays à ma manière, imposant le froid dans toutes les terres... Nonobstant, je ne m'attendais pas à voir ce nuage noirci nous engloutir pour faire de nous de simples rêves, comme si nous n'avions jamais existé...

En fait, si on venait à évoquer cette histoire, je dirais qu'aujourd'hui, ce n'est simplement un conte pour les enfants et au grand jamais je penserais être ce prince des neiges...

« - On t'a laissé filer la dernière fois, mais cette fois-ci, tu n'y échapperas pas... ! ; Donne-nous ton goûter ! » · Le Caïd entre les deux autres enfants tend une patte dans ma direction, attendant simplement que je lui donne mon casse-croûte. Je baisse le regard sur ma maigre pitance. Maigre... Moi aussi je suis fin, le corps élancé, les joues creuses, la peau blafarde, et les prunelles d'un bleu glacé... J'étais maigre. Et ces molosses faisant au moins deux têtes de plus que moi le savaient très bien ! Profitant de ma condition pour vouloir me dérober le petit repas dont mes parents préparaient chaque jours. Et les jours s'établissaient souvent de la même manière où moi-même, j'avais le rôle du bouc-émissaire parmi mes camarades de classe, ce qui fit que je devins rapidement un enfant qui restait souvent isolé dans son coin ; peu actif durant les cours, se faisant petit la plupart du temps et ne cherchant en rien à se démarquer des autres enfants, bien que pourtant assidu au travail... Avant de quitter rapidement son siège lorsque l'heure sonnait pour annoncer la fin des cours. J'étais donc plutôt sérieux d'après les professeurs, mais dès que la sonnerie annonçait la fin du travail, je m'arrêtais net, comme si au fond, je ne faisais que le strict minimum que l'on me demandait... Mes parents se mirent à chercher le problème alors que je passais la plupart de mon temps à la maison, à étudier, mais ils finirent par abandonner tandis que moi, je faisais en sorte à gérer ma vie d'écolier de mon côté, pensant pouvoir régler les problèmes comme un grand... Chose qui se perpétua lorsque ce fut à mon frère d'être plus petit que les autres. Je le défendis donc, même sans pouvoir magique... J'arrivais d'ailleurs à m'en tirer avec brio !

« - Je voudrais un bonhomme de neige...! » · Il ne faisait pas nuit, non. C'était l'hiver, oui je m'en souviens très bien. Et il était là, dehors en train de s'amuser à sautiller dans la neige où à faire des anges. J'étais avec lui, à peine adulte en train de le surveiller, comme me l'avait demandé mes parents. L'emmener quelques parts où nous pourrions profiter de ce temps, plutôt que d'aller à l'école alors que de toute façon, les cours étaient annulés. Je mettais mis à l'observer en lui quémandant de ne pas trop s'éloigner, mais il n'en fit qu'à sa tête.. Et alors que j'étais en train de ramasser de la neige, désireux de sculpter quelques animaux, il avait disparu. Mon cœur s'est emballé et j'ai crié son nom à travers les bois. Il ne répondait pas. J'ai couru. J'ai crié encore plus fort, mais toujours rien.. Au bout d'un certain temps, alors que je remarque un trou au milieu du lac gelé, je me fige net. Et sans réfléchir, je cours en direction du trou pour plonger. J'ai si froid. Cet acte est insensé et bien souvent, on peine à croire que l'on puisse s'en sortir vivant et pourtant, c'est ce qui se passa. Tout les deux, sain et sauf. Néanmoins, on me réprimanda pour avoir laissé mon frère traîner sans faire attention. Tout cela était de ma faute...

Depuis ce jour, je fus assez mal vu d'abord par ma famille puis peu à peu par mon entourage, me poussant donc à faire les valises et quitter la maison familiale dès que j'eus l'âge pour aller habiter dans un appartement seul... Peu à peu, je cherchais à fuir les autres, préférant rester solitaire et me laissant plonger dans mon monde, celui de l'art en général mais aussi et surtout du patinage. Lorsque je parlais d'ailleurs de mes passions à mes vieux, j'avais l'impression de faire des blagues tant cela semblait amuser mon père qui désirait que je continue ce qu'il avait commencé. Mais à présent, j'ai décidé de vivre au jour le jour. Vivre pour moi et moi seul. Bien que je ne dis jamais non à quelques visites, j'essaye de me donner à fond pour réaliser mes propres rêves, essayant d'ignorer cette populace que je considérer comme bon à peupler une ville, rien de plus...